Les jours se suivent mais ne se ressemblent pas forcément …

Hier après midi, j’ai reçu un mail qui m’a collé comme un uppercut en pleine figure, un violent coup de poing dans le plexus …

J’ai perdu mes ailes d’un seul coup …

Une dame que je suis depuis plusieurs années maintenant (dans le cadre de mon boulot) va mourir … et j’ai du mal à m’en remettre, je suis terriblement émue, en colère …triste …bouleversée…

Depuis des années, nous nous suivons, cette dame d’un certain age s’est beaucoup livrée au fil de nos rendez vous mensuels, me livrant je crois des choses qu’elle ne livrait à personne d’autre, je crois que je connaissais de cette personne, des choses extrêmement intimes, je crois que finalement quelque part je la connaissais peut être même plus que certaines personnes qui la côtoient tous les jours …sa famille, ses proches y compris

Lorsqu’elle s’est su malade, je l’ai su avant son fils, avant son mari, …

Pourquoi s’est elle livrée à moi … peut être parce que là tout simplement elle pouvait laisser le masque de côté, parce qu’elle savait qu’elle pouvait, que rien ne sortirait de mes 4 murs, …

Pendant des années nous avons appris à nous connaitre, à nous respecter, à nous apprécier … Elle m’appelle par mon prénom mais me vouvoie (ce qui m’a toujours fait sourire), à elle seule je le permets parce que depuis toujours elle me touche…que je la respecte énormément …et je sais que c’est réciproque …

J’étais là pour l’aider à retrouver un emploi et puis peu à peu les choses au fil des mois, ont évolué, elle s’est confiée, chaque fois un peu plus, sur des éléments très personnels de sa vie…nos entretiens ont pris une tournure plus intime moins professionnelle pour elle …plus amicale, moins formelle…

J’ai appris d’elle tellement de choses, tellement intimes, tellement difficiles à dire j’imagine, son ex mari qui la battait, l’alcool pendant 20 ans pour oublier les coups, la douleur, la honte d’être une femme battue, son abstinence depuis 15 ans,  son fils difficile ne sachant pas voir le courage de sa mère, son mari actuel qui ne la voyait plus ou pas …son combat de tous les jours contre l’alcool, parce que ça restait une lutte permanente et qu’elle en avait conscience, pour s’en sortir, retrouver sa dignité par le travail, sa volonté de fer à vouloir bosser envers et contre tout, contre la maladie qui la rongeait peu à peu, sa dépression, son courage, sa lucidité, …

Je l’admire énormément pour cette force de caractère …pour sa volonté sans faille à se battre …

Ironie du sort après 15 ans d’abstinence un cancer l’a rattrapé, j’ai appris avec elle que les anciens alcooliques n’étaient pas prioritaires pour les greffes dans le cas de cirrhoses … elle est restée digne me disant que c’était normal, pas une once de colère dans ses yeux, pas de sentiment d’injustice …rien juste un constat …serein … face à la maladie, face à la vie.

“Je paye aujourd’hui mes erreurs d’hier …” sont exactement les mots qu’elle m’a dit le jour où elle a su qu’attendre une greffe était vain …

Depuis quelques mois elle ne peut plus venir à nos rendez vous, mais elle a tenu a maintenir nos rencontres mais sous une autre forme, nous correspondons par mail … des échanges spontanés … emprunts d’amitié, d’inquiétude, … je crois qu’elle se livre encore plus …

Hier dans son mail une simple phrase m’a bouleversée …

“Il est des choses dont on doit s’empresser de rire pour ne pas en pleurer”… son courage, ses sourires me bouleversent, son apaisement, sa sérénité … je suis là à me débattre contre ces larmes qui voudraient sortir et que je veux retenir …comme une imbécile …

Dans son mail, elle me remerciait pour nos “rencontres”, pour ces moments où elle a pu poser ses valises… Elle me demandait de toujours profiter de la vie, de ma fille, de prendre la mesure de la beauté de la vie et de tous ces moments qu’elle nous livre sans que souvent on en prenne la dimension, la part de précieux …

Je crois avoir senti dans son mail d’hier qu’elle baissait les armes, qu’elle acceptait …et je ne m’y résous pas …

On ne nous prépare pas à ça dans mon travail … à ces rencontres qui vous bouleversent …

Je ne sais pas dire au revoir … et je sais que je vais être tellement seule le jour où elle s’en ira … parce qu’on ne doit pas nouer ce genre de liens avec les gens que l’on suit il parait, il faut savoir garder de la distance, et je n’ai pas su … elle m’a touché, émue, attendrie … Je n’ai pas PU me protéger … comment aurais je pu face à cette petite bonne femme si fragile et si courageuse à la fois …?

J’ai la trouille de cette fin annoncée, je sais que je vais morfler et pas qu’un peu …parce que je me suis terriblement attachée à cette dame … terriblement …

Julien Doré – Acacia (New song)
envoyé par wonderful-life1989. – Regardez d’autres vidéos de musique.

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publié par Mlle Figolu
Mots-Clés : deuil, travail
Classé dans : Etats d'âme